Parce que l'art est universel
Cet été à Fahitana… témoignage
Je m’appelle Jérôme Albertin et je pratique l’art du dessin. Il y a dix ans nous sommes partis en famille
pendant un mois à Madagascar pour y découvrir ses richesses endémiques et sa culture. Le voyage
tint toutes ses promesses mais le dénuement d’une majorité de la population nous a tous marqué.
Ainsi de retour en France j’ai cherché des associations qui œuvraient autour des problèmes les plus
criants constatés sur place. Le premier concerne l’errance des enfants et leur pratique de la
mendicité. Le critère de choix d’une association travaillant dans ce domaine est aussi important. En
effet, l’image que nous avons des associations humanitaires est souvent faussée par les situations
d’urgence : Famines, séismes, exodes, émigrations… La liste est malheureusement trop longue. Dans
ces cas il est évident que l’intervention doit être immédiate et la présence de toutes les bonnes
volontés nécessaire. La question de la présence d’occidentaux dans le cadre d’actions de fond telle
que l’éducation me pose un problème éthique fondamental. Pour moi, aider ces enfants à vivre dans
leur pays, ce n’est pas leur faire miroiter par notre présence l’existence d’un monde auquel ils
n’auront probablement jamais accès. Il faut les préparer à s’intégrer au mieux, le plus éduqué
possible, dans le pays dans lequel ils vivent et où ils sont né.e.s. Pour arriver à cela, ils doivent être
élevé.e.s et éduqué.e.s par des Malgaches avec un interventionnisme réduit au minimum. La
pratique du parrainage et des aides en présentiel étant de fait exclus de la démarche, beaucoup
d’associations le sont aussi. Attention, je ne conteste ni leur utilité, ni leur intégrité mais leur
fonctionnement ne correspond tout simplement pas à mes attentes ! Il existe bien des associations
qui correspondent à mes exigences mais les trouver n’est pas aisé car leur fonctionnement nécessite
une implantation locale très forte et une structure à taille humaine qui les condamne
malheureusement à travailler à la même échelle en terme de collecte de dons et de communication.
C’est grâce à internet que j’ai trouvé l’association « Quand m’aime? » implantée à Antsirabe. Comme
nous avions passé une semaine dans cette ville lors de notre séjour cela m’a parlé et j’ai fais en sorte
de la soutenir le plus régulièrement possible. Pendant dix ans j’ai pu suivre l’opiniâtre travail de fond
de cette association qui œuvre pour accompagner les orphelins qui lui sont confié.e.s par l’état
Malgache afin de les intégrer dans la vie du pays avec une belle énergie et des résultats probants.
L’été dernier, ma femme et moi avons décidé de retourner à Madagascar. Ma pratique artistique
s’étendant désormais à des ateliers dessin avec le jeune public, j’ai proposé, à titre gracieux
naturellement, une session dessin au crayon dans les locaux de « Quand m’aime ? » à Antsirabe.
Considérant la pratique du dessin comme une activité artistique universelle et formatrice pour les
pensionnaires, ma proposition a été exceptionnellement acceptée. La satisfaction des enfants, des
adolescents et de l’adorable couple qui nous ont accueilli deux heures en matinée durant quatre
jours incite l’association à me solliciter afin de partager ces moments de pratique artistique avec ses
donateurs. Voici donc la page de mon carnet de voyage consacrée à ces instants afin de témoigner
de la réalité et de la qualité du travail accompli sur le terrain par « Quand m’aime ? ».
Journal de voyage
19, 20, 21, 22, 23 juillet Antsirabe
Nuitées dans un bungalow à l’Hôtel Green Park. Quatre jours rythmés par un atelier dessin à
l’association Quand M’aime. Les orphelin.e.s y sont placé.e.s par l’état Malgache. Ils sont pris en
charge par deux « familles » dans des structures à échelle humaine. 25 enfants, un dortoir filles, un
dortoir garçons, toilettes, salle d’eau, une salle à manger et une cour. Tina et Tsiry s’occupent de
leur quotidien et de leurs études jusqu’à ce qu’ils trouvent un travail. Ce fut un plaisir de découvrir
leur volonté de pratiquer le dessin. Les ages allant de 6 ans à 19 ans, tous ont fait preuve d’une
attention remarquable. Cette aptitude à la concentration ne peut s’observer que chez les enfants
grandissants dans un climat propice à la scolarisation. Certes l’expérience et le savoir faire de
l’association en ce domaine est connue mais le constat de cette réalité en ces circonstances fait
plaisir à voir et les sourires de chacun d’entre eux aussi. J’ai réalisé chaque soir le portrait à
l’aquarelle de douze participants au format A6 que j’ai laissé sur place. Le dernier jour nous sommes
allé sur le lieu de travail d’un ancien pensionnaire dont j’avais réalisé deux portraits (2003 lors de son
arrivée à Quand M’aime et 2022 papa de deux enfants, marié et employé d’un cyber café). Mon
malgache étant aussi pitoyable que son français, un bref échange de regard car m’a permis de
comprendre sa satisfaction. Nous avons ainsi pu constater la réalité du travail d’insertion de
l’association dans l’économie locale et compris que notre choix correspondait bien à nos attentes.
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