La rentrée des classes en préparation
La crise de COVID a sérieusement perturbé l’année scolaire 2019/2020 des enfants de l’association comme celle, bien sûr, de nos enfants de France. Mais à Madagascar, il n’était pas envisageable de recourir à l’enseignement à distance. L’année scolaire s’est donc terminée il y a une semaine, il reste encore les examens de BEPC et de BAC (du 19 au 23 octobre) à finaliser. Ces derniers conditionneront l’entrée aux universités qui n’est donc pas encore planifiée.
Pour les autres, les classes de primaires et de secondaires reprendront le 26 octobre pour les écoles publiques et plus tôt pour les écoles privées. Nous voilà donc repartis dans la course aux inscriptions pour tous nos bambins : le paiement des écolages et les achats de fournitures scolaires qui représentent 12% de notre budget annuel (hors étudiants). C’est donc toujours une période un peu compliquée pour l’association, il faut financer les rentrées de nos enfants mais beaucoup de famille très pauvres viennent aussi nous solliciter afin de les aider à financer celles de leurs enfants.
Afin d’illustrer pourquoi une rentrée scolaire est si importante pour l’association, je vais vous partager, avec beaucoup d’émotions, le témoignage de ma nièce Sarah Coudert (18 ans) qui a accepté de raconter son expérience si touchante de la rentrée lors de son voyage auprès des enfants de l’association en octobre 2018…
Arpenter les rues d’Antsirabe en octobre est une réelle épreuve. Je n’évoque pas la chaleur, bien qu’elle soit étouffante et épuisante: marcher un kilomètre sous la chaleur malgache équivaut à trois kilomètres en France. Non, le plus dur ce sont ces femmes, ces mères, ces grands-mères. A l’approche de la rentrée des classes, les familles démunies et sans source de revenue ou presque, rêvent d’un avenir plus beau pour leurs enfants. Lorsque notre existence ne consiste plus à vivre mais à survivre, ce qui nous reste c’est l’espoir. Enfin, moi 16 ans, scolarisée depuis mes trois ans, qu’est-ce que j’en sais. Au milieu de ces femmes brandissant leurs enfants devant nos yeux pour provoquer notre compassion, j’ai honte. J’ai honte car ma normalité n’est pas la leur. C’est comme une gifle, il y a deux jours j’étais sur les bancs de l’école à choisir entre devenir avocate ou journaliste, eux se contenteraient d’une place dans une salle de classe. C’est difficile de regarder droit dans les yeux une maman et lui dire “non, je ne peux pas aider votre enfant à se scolariser” alors que l’éducation est un besoin. Si ces enfants, nés dans la misère n’obtiennent pas un diplôme ou qualification ils n’ont presque aucune chance de s’en sortir.
On ne peut pas aider tout le monde. Mais on peut faire tout ce qui est en notre possible pour en aider le maximum.
Octobre 2018: c’est la première fois que je pose les pieds sur l’île de Madagascar. La rentrée approche. Une mission: payer les frais de scolarité et les fournitures scolaire pour les distribuer au plus d’enfants possible.
J’ai passé la majorité de mon temps à l’orphelinat de Fahitana. Les enfants de Fahitana ont de grands rêves. Lors d’une discussion avec Nirina, je lui demande “tu veux faire quoi comme métier?”. Si vous aviez vu son sourire. Dans son sourire on y lisait une perspective d’un avenir fait d’indépendance et de confort. “Je veux être comptable, comme ça moi-même je n’aurais plus à compter mes sous.” Nirina souhaite s’épanouir dans un emploi stable, au bureau, un contrat qui ne se volatilisera pas au bout d’un mois. Il veut avoir une famille et subvenir aux besoins des gens qu’il aime.
Deux gommes ici, trois stylos là, six cahiers par ici. Avec toute l’équipe on distribue les fournitures scolaires achetées grâce à l’argent des dons. Ces cahiers financés par la générosité des gens ne sont pas de simples feuilles mais le support de ce qui deviendra leur avenir, ils sont essentiels. Le prix de scolarité est démesuré si bien que peu d’enfants sont scolarisés.
Les sacs qui se comptent en centaines sont dans le coffre, direction le petit pays.
Aujourd’hui au petit pays c’est la fête, la musique bat fort dans nos oreilles et dans nos cœurs comblés de joie. Nous fêtons les fournitures scolaires, l’accès à l’école, finalement nous célébrons l’espoir en ces jeunes enfants. Je suis impressionnée par leurs talents de danseur, leur joie de vivre et leur énergie. Après avoir écouté le discours touchant d’Amandine nous distribuons les fournitures scolaires aux enfants du petit pays.
De retour dans le camion, je repense à cette journée, ne sachant décrocher le sourire fixé sur mon visage. Je les regarde tous et j’espère que ces enfants pourront vivre d’autres moments comme ceux-ci.
L’école n’est pas une option et c’est grâce aux dons qu’elle pourra devenir une normalité. »
Sarah Coudert
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